Renfrogné, la mine sombre, les mains entourant un large bol fumant, Toni lapait son grog, debout devant le fourneau de la cuisine. Son ciré jaune ruisselant de pluie gisait sur le sol avec son casque et ses gants.
Il répondit par un grognement sans chaleur au salut de
son ami Nanar...
« Ne faites
pas attention », dit Maria ! « C’est qu’il a eu encore une drôle de journée avec ce froid et cette
pluie ; toute la semaine à patauger au fond de fossés plein d’eau. Ce
chantier n’en finit pas ...
Et les bottes,
miseria, ça finit toujours par prendre l’eau ! »
Dans la pièce voisine, l’écran de la télé attirait les
regards.
La pub vantait les avantages innombrables de la voiture
de demain, celle qui va résoudre tous nos problèmes dans un avenir tout
proche : « la voiture électrique, respectueuse de
l’environnement ! »
« Voilà ce
qu’il faudrait à mon Toni pour remplacer cette fichue mobylette ! »
dit-elle en prenant le professeur Nanar à témoin. « Au moins il serait au sec ... et au moins il aurait chaud pour rentrer ! »
« Bien sûr », dit Nanar, « c’est
une bonne solution ... Pour être au sec, il serait au sec ... Mais si le chantier est loin, il vaudrait
mieux qu’il renonce au chauffage ... »
Maria le regardait sans comprendre ...
« Et aussi aux phares ...Ben oui, tout ça, ça
fait des kilomètres en moins. Remarquez, Maria, pour l’été, ça ne pose pas de
problème ... Et l’hiver, il peut toujours reprendre sa mobylette ! »
« Je crois
comprendre le message que vous voulez me faire passer », dit Maria.
A ce moment, la publicité, remarquablement réalisée,
expliquait à un quidam visiblement subjugué : « Et plus vous freinez, et plus la batterie se remplit ! »
« D’accord »,
dit Maria, « je vois mieux : en
somme, plus on freine, et plus on peut aller loin. »
« Bien vu ! Et encore plus
ingénieux : la voiture hybride. C’est une voiture électrique qui ne pose
aucun problème ; elle fonctionne à l’essence ! »
Maria hocha la tête et ne répondit rien ; elle
aurait juré que le professeur Nanar la faisait marcher...
Pendant ce temps, le présentateur démontrait aux badauds ébahis
que son hybride ne possédait aucune prise de courant pour la recharger.
Et le petite Daniele qui entrait à ce moment se tailla un
vif succès en rappelant à sa petite maman chérie qu’elle avait encore oublié de
lui acheter des piles rechargeables pour sa voiture téléguidée, 4 AA 1,5 volt
et une de 9 volts pour la télécommande, précisait-il...
Eh oui, quand les batteries coûtent plus cher que le
véhicule, on comprend que les mamans oublient la commission.
Ou se font tirer l’oreille.
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