mardi 11 septembre 2012

Les entretiens du professeur Nanar (15)










La traversée de l’Espace





Un vrai billard. Et en plus, ça descendait. Toni mit le cap vers la place et la poignée dans le coin. Au doigt mouillé, il estima qu’il frôlait le 30 à l’heure.

Attention ! lui disait une petite voix intérieure ; tu vis dangereusement : zone 30, PV en attente...

Mais confiant dans la vétusté du 49,9 allergique à la perfe, même par vent arrière et encore davantage aux additifs « spécial compète », il se laissa aller à la griserie de la vitesse et à la satisfaction de pouvoir enfin profiter à nouveau de l’invention de John Loudon Mac Adam, au lieu de guidonner comme c’était le cas depuis des semaines, sur une piste façon fakir hindou, hérissée de pierraille poudreuse et parcourue par des bolides.
Pas longtemps, cependant, car si la pente est raide et la note possiblement plus salée qu’une autoroute en plein hiver, la piste d’envol est plutôt brève ...

Pour comble de malchance, un quidam traversait inopinément, s’aventurant sur un zébra tout neuf afin d’en évaluer la pertinence. Toni immobilisa sa monture de justesse. Un voisin effrayé par le crissement des pneus sur l’asphalte souleva le coin d’un rideau ...

« Fougueux vélo motocycliste pétaradant », l’interpella le piéton, « pourquoi cette frénésie à vouloir escrabouiller le flâneur pacifique déambulant sur l’Avenue de la Démocratie ? »
Le moteur cala sur cette interpellation, probablement aussi surpris que son propriétaire par la rencontre du professeur Nanar et par ses propos décalés.

« Ami tonitruant », répartit enfin le danger public motorisé, « je ne sache pas qu’on ait à ce jour débaptisé ce coupe-gorge royal ? »

« Si ce n’est officiel », dit Nanar, « il serait tout à fait logique qu’on en envisageât dans un jour prochain l’éventualité ... »

« Oui, mais » dit Toni, « « avenue », je trouve ça un peu exagéré... Quant à « démocratie », là ... »

- Attends, cher ami trop pressé : dis-moi combien tu en vois des chênes, des tilleuls, des acacias, des lilas et des roses dans les rues qui en portent le nom ?
Je ne parle même pas de la « Rue de la Paix ». Encore moins évoquerai-je la « Deutsche Democratische Republik » !

Toni resta un moment interdit puis, il eut comme une fulgurance :
- Professeur Nanar, dit-il, ma mob, je vais l’appeler « Blitzschnell1 ! ».

Il avait tout compris.

Une petite fille qui avait tout vu, l’a raconté et on la peut croire sur parole : Toni est reparti en s’esclaffant.
Et en pédalant car Blitzschnell n’a jamais voulu redémarrer...

Et TOC !

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1 – NDLR : Toni aurait pu l’appeler « Quick as lightning », mais cela lui a semblé plus difficile à prononcer.

3 commentaires:

  1. Toni et Pr Nananrd, une belle amitié...

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  2. Toujours plein d'humour notre Professeur Nanar. Cela fait du bien dans cet environnement actuel!!!!
    Bravo prof

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  3. Parce que "Blitzschnell" est facile à dire peut-être ?
    "Rapide comme le vent" ce serait joli aussi..
    Ou "Lévrier"..

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