lundi 19 août 2013

L’arroseur arrosé








On se saurait trouver formule plus judicieuse, plus gracieuse, plus aimable, pour accueillir sur le perron d’une bibliothèque municipale le visiteur. Afin de l’encourager à se cultiver, approuver sa démarche, l’inciter à persévérer ? Afin qu’il se sente à l’aise dans un lieu de culture ?

Non, juste pour le faire douter de son intelligence. Car finalement, ce paradoxe dévastateur tiré malhonnêtement de son contexte1 est injurieux pour celui qui le découvre.

Le premier émoi passé, gageons que le client frustré va refuser l’avertissement et retourner le compliment contre celui qui l’a fait inscrire et, sans erreur possible, décider que celui qui a choisi une telle formule est bien à l’abri de se rendre compte de son état !

Maintenant, si la médiathèque est un endroit où on peut parfaire ses connaissances, pourquoi ne pas y rechercher le texte complet de Brassens ?

La phrase citée en exergue à l’entrée du bâtiment devient beaucoup plus intéressante et appelle des questions :

Qui ne supporte pas la contradiction ?

Qui se bat bec et ongles pour éradiquer une association qui conteste ses décisions ?

Qui fait obstacle à toute tentative de consultation des documents communaux ?

Qui se croit autorisé à donner des leçons de morale, de civisme ?

Et puis, pourquoi se limiter à l’évocation de l’intelligence quand la mesure du QI ne rassure personne, quand sa définition varie selon les époques, le milieu, la situation, l’auteur ... Mettons aussi dans la balance les paramètres indispensables : l’aptitude, la compétence, les capacités, la culture ... avec l’honnêteté, intellectuelle et morale indispensable.

Et puisque l’ajout d’une citation n’est pas un domaine réservé, en voici une célèbre à méditer ; elle est de Benserade et concerne un personnage peu recommandable dont tout le monde a entendu parler à l’école...



Ci-gît un fameux Cardinal

Qui fit plus de mal que de bien.

Le bien qu'il fit, il le fit mal.

Le mal qu'il fit, il le fit bien.



En somme, le poète a bien raison...



Sainte Marie, mère de Dieu, fais-lui un signe !2

-------------------------------------------------------------
1 – Ceux qui ne pensent pas comme nous – Chanson de Georges Brassens enregistrée en 1982 par Jean Bertola (voir texte intégral en fin d’article)

2 – NDLR : on ne s’offusquera pas ici d’une référence religieuse, le « mécréant » de Brassens ne s’en privait pas.
-------------------------------------------------------------

Quand on n'est pas d'accord avec le fort en thème
Qui, chez les sorbonnards, fit ses humanités,
On murmure in petto : "C'est un vrai Nicodème,
Un balourd, un bélître, un bel âne bâté."
Moi qui pris mes leçons chez l'engeance argotique,
Je dis en l'occurrence, excusez le jargon,
Si la forme a changé le fond reste identique :
"Ceux qui ne pensent pas comme nous sont des cons."

{Refrain:}
Entre nous soit dit, bonnes gens,
Pour reconnaître
Que l'on n'est pas intelligent,
Il faudrait l'être.

Jouant les ingénus, le père de Candide,
Le génial Voltaire, en substance écrivit
Qu'il souffrait volontiers - complaisance splendide -
Que l'on ne se conformât point à son avis.
"Vous proférez, Monsieur, des sottises énormes,
Mais jusques à la mort, je me battrais pour qu'on
Vous les laissât tenir. Attendez-moi sous l'orme !"
"Ceux qui ne pensent pas comme nous sont des cons."

{Refrain}

Si ça n'entraîne pas une guerre civile
Quand un fâcheux me contrarie, c'est - soyons francs -
Un peu par sympathie, par courtoisie servile,
Un peu par vanité d'avoir l'air tolérant,
Un peu par crainte aussi que cette grosse bête
Prise à rebrousse-poil ne sorte de ses gonds
Pour mettre à coups de poing son credo dans ma tête.
"Ceux qui ne pensent pas comme nous sont des cons."

{Refrain}

La morale de ma petite ritournelle,
Il semble superflu de vous l'expliciter.
Elle coule de source, elle est incluse en elle :
Faut choisir entre deux éventualités.
En fait d'alternative, on fait pas plus facile.
Ceux qui l'aiment, parbleu, sont des esprits féconds,
Ceux qui ne l'aiment pas, de pauvres imbéciles.
"Ceux qui ne pensent pas comme nous sont des cons."


14 commentaires:

  1. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

    RépondreSupprimer
  2. En arpentant la Grand rue dimanche dernier à moult reprises j'ai à chaque fois été interloqué par cette citation. Je comptais bien en faire quelque chose, voilà qui est fait et avec quel talent !
    D'ailleurs ça n'est pas une citation. Juste quelques mots pris à quelqu'un, sans le citer justement et sans mention de troncature. Dans une rédac ça vaut zéro et la mention "citez vos sources".
    Ce qui m'a interpellé aussi c'est son emplacement. Une bibliothèque. A priori ça n'est pas un lieu dogmatique, mais un lieu de culture, de partage, de formation, d'information, de respect. Tout message, surtout à caractère exclusif mis à son fronton (en l’occurrence son mur) est malvenu, voire déontologiquement fautif. Que va penser un pauvre bougre en découvrant cela à l'entrée ? Qu'il n'y a pas sa place ? Alors qu'au contraire les missions sont l'accueil de tous, la culture pour tous. Et il y a de nombreuses personnes qui viennent en bibliothèques qui ne savent pas écrire (et tant mieux) et notre mission est de les accompagner.
    Bien vu (et drôle) pour le radar Alf le Red. Lui aussi m'a scié. Quand on voit dans les bourgs anciens et tortueux ce genre d'appareil fixé au mur, là on a un totem qui barre le trottoir. J'attends de voir la réaction de la première personne en fauteuil qui va vouloir passer par là.
    J'y vais de ma citation, soyons fous : "Le con ne perd jamais son temps, il perd celui des autres." Frédéric Dard
    Le combat de l'ARLLE corrobore pleinement ce constat.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je me suis mal exprimé... qui ne savent pas écrire (et tant mieux [qu'elles viennent])...Ne me faisons pas dire ce que je ne pensais pas

      Supprimer
  3. L'ARLLE pourrait ajouter dans l'objet de ses statuts : " Lutter contre les effets néfastes de la connerie des non braves " (Réf : Brassens - Quand les cons sont braves - Chanson, elle aussi interprétée par Bertola - Voir les paroles ICI .
    " Vaste programme " aurait dit le Général !

    RépondreSupprimer
  4. Le choix des mots, leur place à l'entrée d'un lieu de culture et d'éducation en disent long sur la personnalité du "sélectionneur" !

    Toujours se croire au-dessus des autres, conforté en cela par la servilité béate de ses collaborateurs, conduit à ce genre de dérive.

    De l'oeuvre si riche de Brassens, ne retenir qu'une phase tronquée qui en devient injurieuse, c'est plus que pitoyable.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Sans doute, le " sélectionneur " utilise Brassens parce que cela fait bien, pour séduire ses admirateurs (comportement psychopathique ?).
      Peut-on d'un côté, adhérer sincèrement et honnêtement à certains principes libertaires (notamment la liberté totale d'opinion et d'expression) et adopter par ailleurs un comportement liberticide ?

      Supprimer
  5. Y a-t-il une équipe dans l'avion ou avons-nous affaire à l'hydre à 9 têtes ? Entre le terrain de foot-parcours de santé, le radar pédagogique bouchant le passage (j'imagine tous les dessins rigolos qu'on pourrait faire !), voici les leçons de morale à la porte de la médiathèque ! Pas d'annonce en fanfare pour ces réalisations, installées quand ? par qui ? pourquoi ? (A propos, la page médiathèque "croq-livres" est abandonnée et mériterait un petit rafraîchissement). L'office de tourisme local va pouvoir proposer un circuit spécial bêtisier.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui CashDylan, j'avais déjà relevé cette incongruité de la page Croq-livres il y a plus d'un an, m'amusant de la Fête de la musique de 2003 et d'un lien vers France Culture depuis longtemps aux oubliettes

      Supprimer
    2. Et qui dira combien ces aménagements coûtent au contribuable ressonnais ?
      Parce qu'enfin, ce n'est pas gratuit.

      Curieusement, on n'a jamais entendu parler de ces réalisations en réunion de conseil municipal ni dans les bulletins municipaux censés informer la population de ce village dynamique.

      Supprimer
  6. Un de ces jours, à Ressons, "Liberté, Égalité, Fraternité " sera remplacé par " Les copains d'abord " !

    RépondreSupprimer
  7. Quel mépris quand même pour les Ressonnais!

    RépondreSupprimer
  8. Fâché que l'on ait, hier, supprimé mon commentaire, je voudrais néanmoins préciser qu'il n'était pas recherché dans mon bricolage des vers de Tonton Georges un quelconque rapprochement avec une Ressonnaise prétendue vulgivague.
    Seules les langues de pute auront pu y voir une attaque de personne.
    Indirectement, c'est une fois de plus Brassens, qui a été censuré.
    Je cherche encore à placer le dernier vers d'"Hécatombe" ... sur la porte de la salle du conseil, peut-être ?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Henri,
      Par respect pour ces dames qui, à mes yeux, ont plus d'utilité sociale que celui qui fait fonction de maire, j'aurais préféré que vous utilisiez "langues de vipère".

      Supprimer