jeudi 1 août 2013

Bricolage













Il avait juste fait deux pas dans l’allée quand il entendit vociférer dans la maison. Indécis, perplexe, ne sachant quelle conduite à tenir dans une telle situation incongrue, il préféra rebrousser chemin. Courageux, mais circonspect ...

Toni apparut sur le seuil alors qu’il se croyait déjà hors de danger.

« Entrez donc, Prof, Vous n’avez quand même pas peur d’une mère tançant son gamin ! »

Difficile d’éviter l’affrontement, mais, la porte franchie, les cris cessèrent.

Sur la table de la salle à manger, il aperçut un gigantesque puzzle, celui-là même qu’il avait offert quelques jours auparavant à Daniele. Bien avancé, d’ailleurs ... Il se crut diplomate :

« Remarquable », dit-il, « beau travail pour un enfant de cet âge ... »

Maria n’apprécia pas le compliment.

« Comment ça ? Vous allez encore le féliciter par-dessus le marché : un tricheur, un faussaire, un truqueur, ce ... ce ... falsificatore, ah, mamma mia ! »

Sa voix s’étrangla. Heureusement, Toni était resté imperturbable et devant le regard interrogateur de Nanar, il se lança dans des explications pleines de détours que le professeur Nanar aurait bien voulu éviter ; il n’est pas rare que le plaisir de raconter gâche celui d’écouter.

Bon, au fait, Toni, il a fait quoi, ton gamin ?

Interloqué par la brusquerie du propos, Toni marque un temps d’arrêt, puis accouche :

Ben voilà, quand il ne trouve pas la bonne pièce, celle qui va au bon endroit, il ...

Il fait quoi ?

Attends, tu vas tomber sur le cul, Prof. Oh pardon !

Il fait quoi, Toni ?

Attends, je te dis : il retaille, il redécoupe, il bricole, il trafique, il bidouille ... avec les ciseaux à couture de Maria.

- Oui, dit Nanar en s’esclaffant bruyamment. Je vois : il « adapte » en somme !

C’est comme ça que vous voyez la chose, dit Maria qui retrouvait sa fureur. Ben vrai, ça promet !

Ne vous mettez pas dans cet état, ce n’est qu’un enfant ; et ce n’est qu’un jouet en carton. Et puis, je vais vous dire, Maria, on ne peut pas demander plus à un enfant de huit ans qu’à des adultes : j’en connais qui bricolent beaucoup de même et qui sont pourtant censés avoir atteint l’âge dit de raison.

- Ils font encore des puzzles, demande Toni éberlué ?

Devant une telle naïveté, le professeur fut bien obligé de préciser sa pensée. Il l’entraîna loin de la scène de crime.

Ce qu’ils se dirent à voix basse, personne ne l’entendit.

Respectons leur secret : toute vérité n’est pas bonne à dire...


4 commentaires:

  1. Menteur, falsificateur, bricoleur de lois ...
    Silvio ?

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  2. Moi je dis que c'est la faute aux parents. Manque d'éducation et de discernement. Quand on a comme exemple une autorité tutélaire qui balaie d'un revers de main une élection européenne, qui retaille la carte judiciaire, forcément, le gamin veut faire pareil... Sauf qu'il n'a fait ni Sciences Po ni l'ENA, ni non plus sa bande de potes... Du coup ça fait un peu plouc, brouillon, vu que à part vouloir emmerder ses contemporains la pensée politique est un chouïa courte. Donc pas de consistance, juste du mimétisme (les grands singes font mieux, ils ont de l'initiative dans un contexte donné). C'est ça la différence. Autant le papa spirituel avait une idée générale en tête autant le môme ne fait qu'imiter sans réfléchir (faut dire que pour réfléchir il faut un cerveau, denrée rare). C'est la différence aussi entre l'autorité naturelle et l'autoritarisme. Pour celui qui a l'autorité naturellement, nul besoin de répéter à tout bout de champ que c'est lui le chef. Pour le pauvre frustré qui nous concerne, son autorité est tellement inconsistante qu'il lui faut l'imposer à chaque coin de rue... C'est le début de la dictature, du culte de la personnalité, du cauchemar de la secrétaire de mairie et autre salariés. Je rappelle que y compris pour les fonctionnaires de la FPT le recours administratif existe, ainsi que le droit de retrait... Ça permet d'éviter les bounga-bounga ou autres dérives. On relira avec profit la BD Iznogoud... On pourrait sans se forcer faire un pastiche pour Ressons avec "Veribad" ou "Nick the rotten"... Avis aux dessinateurs et aux scénaristes, y'a de la matière. Quand le crétinisme est involontairement porté à une sphère qui relève de l'art, faut immortaliser le truc. J'espère qu'on ne verra pas ça dans les 6 prochaines années.
    Kenavo

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    1. La faute des parents ? Mouais !
      C'est trop facile à dire !
      L'oisillon a pris son envol.
      Il est maintenant entouré d'un cercle d'adultes responsables (et pour certains honorables) qui lui laissent faire ses caprices.
      Alors les parents ? Il n'y sont plus pour rien !

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