« Ca y est,
Prof, on est borné », s’esclaffa Toni. « Vous allez enfin pouvoir l’acheter votre voiture
électrique ! »
Le premier kir n’avait pas semblé perturber son humeur ;
le second plongea Toni dans une euphorie inhabituelle. Pas tout à fait la
bouffée délirante, mais jugez vous-même !
« Ben oui, Prof »,
disait-il, « tu vas pouvoir
l’acheter ta bagnole écolo : t’as une borne à deux pas ! »
Le professeur Nanar, eu égard à l’état perturbé des neurones
de son ami, se retint de mettre en doute le caractère écologique de la voiture
électrique. Il préféra entrer dans son jeu.
« Et pourquoi tu n’y songes pas toi
aussi ? En revendant ta mobylette de collection – ça doit aller chercher
un bon prix une ancêtre de ce gabarit – tu pourrais aller au boulot sans casque
et sans pinces à vélo ! »
« Super »,
dit Toni, regardant rêveusement le fond de son verre, comme s’il y voyait la
REVA1, la MINI E ou la THINK
CITY.
« C’est sûr
que j’y pense », finit-il par avouer. « En plus, cette borne, elle nous coûte un bras à nous qu’on n’a pas de
voiture électrique. Ca s’rait juste d’en profiter »
Nanar se régalait devant la candeur de son ami.
« En plus, mon petit Toni, toi qu’es pas
loin : le soir, tu porterais ton char à la borne. Le lendemain matin, tu
viendrais le reprendre2 : t’as à peine 1500
mètres à faire ... »
« Comment
ça ? … A pinces ? … Tu rigoles ? »
La perspective l’avait un peu dégrisé.
« Alors », dit Nanar, « tu en
achètes deux, tu en laisses une en charge et tu reviens avec l’autre. Qu’en
penses-tu ? C’est pas une bonne idée ? »
« Je pense »,
dit Toni, « que vous vous payez ma
fiole »
Et Maria, qui venait par précaution reprendre la bouteille,
le regarde avec un sourire enjôleur :
« Mon grand
chéri », dit-elle, « tu
pourrais même passer l’aspirateur. Je l’ai lu dans le bulletin municipal ! »
Cette fois, l’ironie était trop éclatante et les effets
des kirs n’étaient plus de taille à paralyser ses neurones.
- Comment que
j’irais passer l’aspirateur à trois bornes. Y’a pas des prises ici des
fois ?
- Bien sûr, mon
petit mari. C’était juste pour t’aider à t’en souvenir. Alors ta bagnole, tu
pourrais aussi la recharger chez toi, non ?
Toni ne répondit rien. Il baissa le nez, puis disparut
dans la cuisine.
Au bruit, Nanar conclut que son ami était vexé. Et qu’il
était en train de se servir un nouveau verre. Par contre, impossible de savoir
si c’était un verre d’eau.
Une question restait sans réponse : qui donc va
venir brancher son bazou sur cette foutue borne ?
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1 – REVA I : voiture
sans permis – longueur = 2,63 m – 15.000 euros
2 – N.D.L.R. : le
temps de charge est variable selon la prise utilisée et l’état des batteries. Dans
certains cas, il peut nécessiter jusque 10 heures.
Installation parfaitement inutile actuellement dans notre commune et qui démontre le besoin de notre édile d'être "le premier" afin d'éblouir ses fans. En effet, si un Ressonnais achète une automobile électrique, il fera installer une prise adéquat chez lu, ce qui est tout de même plus confortable!
RépondreSupprimerSi un automobiliste de passage désire recharger son véhicule il lui faudra, à proximité, un restaurant et un hôtel, structures inexistantes dans notre "village dynamique". Braves Ressonnais, payez, payez pour des équipements bien inutiles !!!!
Bande d'ignares,
RépondreSupprimerA l'image du Génie de la vallée, cette borne est de type rechargement rapide à intelligence évolutive.
Le temps d'un coca-déca au 5 de la place ... et hop !
Au delà de la question de la pertinence d'une telle installation dans un bourg rural (il y a deux bornes à Soissons dont une libre, une au Leclerc de Chambry, trois ou quatre à Compiègne, d'autres à Laon, Chauny et certains particuliers mettent à dispo leur borne -contre contribution-), du coût (raisonnable ?) supporté par la commune et donc des citoyens (étude d'impact faite ? A quel horizon ?), cette initiative me semble hâtive et me pose question.
RépondreSupprimerHâtive car pour le moment il existe trois ou quatre modèles de prises développés par les constructeurs en Europe. Une directive européenne devrait normaliser cela avec des dérogations pour les pays les plus avancés (France, Allemagne, Estonie) pour une durée limitée (?). Quelles normes seront retenues ? Pour le moment la directive retient le type 2 pour la charge normale et le combo pour la charge rapide. La décision devrait être prise à l'été 2014. Voir les 3ème Assises Nationales IRVE qui auront lieu en février prochain.Ce qui n'est pas si loin.
Et je me pose une question car dans l'Aisne Nouvelle du 4 novembre 2013 (la décision municipale date de août, donc antérieure) on peut lire que l'Useda envisageait de développer un parc de bornes mais "Sûrement pour un coût prohibitif pour les petites communes" est-il mentionné (réaction dans la salle ?). D’où mon interrogation. Pourquoi se précipiter en fin de mandat pour faire un tel investissement alors que dans quelques mois les choses devraient être plus claires ? J'ai fouillé le site de la mairie pour connaître le type de borne la (les) connectique(s) retenue(s), le type d'accès de paiement (QR code, SMS, appli smartphone ?), rien trouvé... Par contre d'autres perles mais c'est pas le sujet. Ça sent le coup fumant, achat impulsif, purement électoraliste.
Et alors mauvaise nouvelle pour Tony... Le jour où il remplacera sa vieille meule (je comprends mieux le brouillard le matin ;-) !) par un vélo à assistance électrique, il ne pourra même pas participer au retour sur investissement de la borne... Mais il pourra faire fumer son compteur bleu à la maison. La voiturette, franchement, c'est pas sérieux !!!